Voici une anecdote de voyage qui illustre bien les situations de la vie en général et combien il nous est difficile parfois de voir l’ensemble du tableau que la vie veut nous dessiner.
Avant notre départ, un couple d’amis nous avait parlé d’une expérience inoubliable vécue aux Philippines. «Vous devez ABSOLUMENT faire ça!» 5 jours de croisière sur un bateau typique du pays, à naviguer dans les îles reliant Coron à El Nido, à s’arrêter dans des villages de pêcheurs, à faire du snorkeling sur des sites peu visités et à vivre la vie paradisiaque d’un Robinson Crusoé nomade!
Première résistance dans l’équation : le prix. «Ouf! C’est cher!» Mais, des fois, on réussit à se convaincre que le prix est justifié, on a fait notre enquête, on n’a rien trouvé d’autre dans ce type d’excursions, on voulait absolument vivre cette expérience, on ne voyait pas d’autres possibilités et on s’est entêté.
Deuxième résistance : le site web. Le site de la populaire compagnie est très mal foutu. On a tenté d’écrire à l’équipe, nos courriels se sont mêlés, on s’est vite retrouvés perdus dans nos échanges. Mais on y tenait, à ce voyage!
Troisième résistance : le paiement. Impossible de faire le virement pour confirmer notre place à bord du bateau. Après avoir passé 3 heures avec ma banque, la veille de notre départ pour les Philippines, j’ai abdiqué. Je me suis dit : advienne que pourra, on ira voir s’il reste de la place en personne, si oui on le fait, si non, on trouvera autre chose… Ça devenait vraiment trop compliqué et des fois, il faut écouter la résistance que la vie nous offre. Elle a toujours un sens. (Même si, souvent, on ne le voit pas.)
On s’est donc rendu à Coron, on est allé chez Tao (pour ne pas les nommer) et surprise, il y avait de la place. On a décidé de confirmer notre réservation avec eux, on s’est dit que c’était un signe.
Puis les choses ont continué de dégénérer. Tellement qu’on se serait cru dans un film. On a passé des heures au téléphone avec un gérant excédé et émotif qui nous expliquait que les courriels s’était croisés, qu’on ne pouvait plus partir parce qu’il n’y avait jamais eu de place et que c’était un malentendu, bla bla. On a tenté de résoudre le problème, on s’est tous énervés, on a tenté de se calmer. On a vécu les montagnes russes, dans un pays où le service à la clientèle est tout aussi défectueux qu’au Québec, sur des points différents, où personne ne reconnaît ses erreurs et finalement, on s’est fait dire que c’était correct, qu’on pourrait partir…
Puis quelques heures plus tard, dans la soirée, Jérôme a reçu un courriel de cette gang de demeurés nous disant dans des termes démesurément courtois qu’ils nous refusaient l’accès à l’activité à cause de notre attitude, et nous avaient déjà remboursés via Paypal. Sans équivoque.
J’ai senti physiquement dans mon corps l’onde de choc. Je l’ai observé avec un certain recul. «Tiens! C’est ça un égo blessé? Ça fait mal, le rejet!» J’ai figé, hésitant entre rire tant la situation était absurde ou crier, les appeler et recommencer à leur dire ma façon de penser. Mais c’était évident que la seule réaction logique était la première.
Pendant toutes les étapes de résistance, je me disais intérieurement : «faites que la solution se montre clairement, je ne sais pas si ce voyage est pour nous». Et à chaque fois que la réponse que ce n’était pas pour nous s’est montrée le bout du nez, je l’ai ignorée, convaincue que ça devait être cette excursion-là parce que je n’en connaissais pas d’autres. Mais là vie a plus d’un tour dans son sac, et quand elle a compris ce que je voulais vraiment, elle s’est assurée que j’allais l’écouter en m’acculant au pied du mur, moi la fille qui nageais à contre-courant.
Le lendemain, on s’est dit qu’on allait se trouver une plongée et voir ce qu’on ferait ensuite. Au centre de plongée, la gentille propriétaire allemande nous a conseillé plusieurs trucs à faire et quand on lui a parlé de notre mauvaise expérience avec Tao et notre envie de faire une croisière hors des sentiers battus, elle nous a tout de suite parlé de Don Don. «Il organise exactement le genre de voyage que vous voulez. Je lui fais confiance, c’est un gars génial.»
On a trouvé Don Don dans son Auberge Jeunesse, le Fat Monkey, et il nous a parlé de ce tour de 3 jours dans les environs de Coron. Pas de hordes de touristes, pas de prix fous, juste un truc authentique comme on voulait. Le prix était pour 4 personnes et j’ai tout de suite su que les 2 voyageurs formidables rencontrés dans le ferry pour Coron allaient vouloir venir avec nous.
Vous savez de quoi je parle; quand le voile mystérieux d’événements en apparence négatifs se lève et qu’on comprend tout. Ce moment où on sait exactement que tout va s’arranger parce que c’était exactement comme ça que les choses devaient se dérouler, depuis le début. Je n’avais rien voulu entendre parce que mon mental s’affolait, parce que je ne lâchais pas prise sur la partie que je ne contrôlais pas.
À ce moment, j’ai compris ma leçon et je me suis demandé combien de fois je devais vivre des situations semblables pour me souvenir, quand le courant se ferait encore sentir, qu’on doit toujours aller dans le sens de la rivière qui coule! Comme dirait Diana, l’espagnole avec qui j’ai passé les 3 derniers jours sur ce bateau : Follow the River!
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